Musée d'Art Naïf International
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Du 09/10/2024 au 09/03/2025

NAÏFS DES VILLES ET DES CHAMPS

Des milieux plutôt monotones des villes transformées en univers bariolés aux scènes joyeuses des fêtes de villages, les naïfs ont toujours réinventé l’habitat à l’aune de leur imaginaire. C’est de cette approche émerveillée de nos lieux de vie et, par extension, du vivre-ensemble, dont il est question dans l’exposition Naïfs des villes et des champs. A travers une sélection de 60 œuvres, l’exposition met en scène des créateurs en réaction face à une société moderne qu’ils jugent trop rationnelle. A rebours des pratiques actuelles, ces « peintres du cœur sacré » - comme les appelait le critique d’art Wilhelm Uhde au début du 20ème siècle - communiquent une philosophie de vie prônant la contemplation et le ralentissement. En quatre sections, cet accrochage explore tout à tour la propension des naïfs à faire de la rue un spectacle, leur engouement pour les festivités en tous genres, et leur créativité débordante, lorsqu’ils s’improvisent architectes visionnaires d’habitations tout droit sorties d’un conte fantastique. Sous couvert d’idéalisme, les naïfs interrogent nos rapports humains et nos rythmes de vie et de production. Ils invitent le regardeur à faire preuve de fraternité, à revoir ses priorités, ainsi qu’à trouver son bonheur dans des plaisirs simples. Véritables moralisateurs, ils font du superflu l’essentiel. Ils peignent des fêtes populaires (mariages, fêtes de village, promenades du dimanche) et des châteaux abracadabrants, des anges cohabitant avec les hommes, des trottoirs bleu mer et des ciels jaune poussin. Des villes aux campagnes, ces toiles sont autant de coups de projecteurs sur un mode de vie célébrant le vivant sous toutes ses formes. En présentant ces lieux de vie hors-norme dans l’écrin de verdure hors du temps qu’est l’ancienne maison de Max Fourny, le musée d’art naïf de Vicq propose un moment d’accalmie à quiconque franchira ses portes. Si cette exposition est en majeure partie composée d’œuvres issues de la donation principale du fondateur des lieux, de récents dons d’artistes reconnus (Fabienne Delacroix, Bernard Vercruyce) permettent au MIDAN d’apporter une nouvelle pierre au précieux édifice bâti par le critique d’art Max Fourny en 1973

Commissariat : Emma NOYANT
Collection Max FOURNY et Françoise ADNET

Jusqu'au 9 Mars 2025. Réservez votre visite

ESPACES URBAINS

« C’est en s’urbanisant que l’homme s’est reconnu dans un espace, dans un art, une architecture, une pensée, une foi, une politique, un droit, une organisation, une volonté de puissance, autant de composantes à la fois diverses et communes, harmonieuses et contradictoires. (…) Chaque ville est un être vivant. Avez-vous déjà observé une fourmilière ? Ses habitants y sont si nombreux et actifs que cette montagne de brindilles, de grains et d’épines, creusée de galeries et d’habitats, semble elle-même respirer, bouger, croître, réagir, se protéger, digérer, s’endormir… Ainsi de la ville… Tellement vivante et captivante qu’elle marque nos sentiments, forme nos goûts, conduit notre destin, exige de nous l’amour ou la haine, mais toujours la passion, jamais l’indifférence ! » La Cité et les Naïfs, texte de Gilles Mermet édité par Max Fourny. En représentant la ville, les naïfs s’emparent de notre réalité quotidienne et la transposent dans un monde merveilleux qui leur est propre. La manière dont ils représentent les éléments d’une vie agréable (beauté des monuments, plaisir des activités qu’offre la ville) entend faire goûter l’existence avec plus d’intensité. Sur le plan plastique, les éclairages, la densité d’habitants, les flux continuels d’engins et de vivants, les frasques et les joies sont autant d’occasions de déjouer la perspective conventionnelle, de multiplier les détails ou de travailler l’onirisme des couleurs. Fabienne Delacroix peint une capitale lumineuse et colorée en toute saison tout en montrant les plaisirs simples et innocents auxquels s’adonnent ces personnages qui pourraient être nous. Ljubomir Milinkov harmonise le réel plus que de mesure en donnant à son tableau parisien un aspect de mosaïque. Symétrie, humour et symbolisme constituent la formule typiquement naïve de l’œuvre de Joop Plasmeijer. Quant à Epple et ses cuisiniers gâtant la sauce, il n’est pas en reste sur la question du décalage humoristique. Ces maîtres populaires d’une réalité déjouée font de la rue un spectacle et poétisent le banal. Cette section rappelle les toiles d’un Rousseau épris de Paris, qui fut témoin de la naissance de la modernité dans la ville.

Description de l'image
"L'Opéra de Paris" Ljubomir MILINKOV

PARTIES DE CAMPAGNE

Le premier jour de fête de l’art naïf remonte à 1892. On le doit au Douanier Rousseau. D’après La Fête et les Naïfs(éditions Max Fourny), il s’agit « d’une ouverture solennelle, où les danseurs en foule évoluent, d’une journée débordant de joie où les drapeaux flottent au vent. » Et de fait, la danse est légère, joyeuse, les couleurs sont éclatantes et la composition harmonieuse, dans ce tableau sobrement intitulé La Fête estivale. Si, par essence, la fête est subjective, spontanée et populaire, on comprend aisément l’attrait que lui porte ces peintres. Pourtant, depuis Le Douanier Rousseau, ces fêtes « factographiquement » fidèles à la réalité sont souvent peintes avec raideur. Pendant ces manifestations, il arrive que ces personnages ne soient pas exaltés, mais dignes, voire même parfois sérieux. Il y a dans certains tableaux naïfs une solennité de la fête presque cocasse. Dans la toile de Jean-Claude Sévère, par exemple, les mouvements semblent arrêtés, et les protagonistes, figés dans l’action. S’agit-il de maladresse de la part du peintre, ou d’une manière d’entretenir un certain mystère ? Quoi qu’il en soit, le peintre s’émancipe par ce biais de l’académisme. Et que dire de Jacqueline Benoît, sinon qu’elle radicalise cette dimension mystique du moment de repos à la campagne ? Malgré les fleurs, les enfants et les barques sur l’eau, le tableau est pure poésie, mythe, voire un rêve, qui n’est pas sans rappeler ces mots de Wilhelm Uhde à propos de Rousseau face à la nature, qui avait « sollicité chez lui son sentiment religieux et son imagination » et que d’elle venait « la note mystique de ses tableaux. » En peignant des Vénus pétrifiées dans un paysage vert glacé, Benoît prouve que la profondeur mystérieuse des Naïfs va parfois à l’encontre de la joyeuse légèreté qu’on leur attribue ordinairement. A la campagne, le thème des festivités induit aussi souvent une présentation du paysage comme une fête se succédant à elle-même à chaque nouvelle saison. « C’est la fête des arbres, des fleurs, des nuages, des feuilles, des oiseaux, des collines et des prés. »
(d’après La fête et les Naïfs, ouvrage édité par Max Fourny)